Les plastiques : histoire et synthèse


Les plastiques sont partout dans notre vie. Emballages alimentaires, jouets, transports, textiles, matériels de communication etc.  Tous ces plastiques sont différents, mais un plastique c’est quoi ? Et depuis quand ça existe ? Et comment on les fabrique ? Image : Lego en acrylonitrile butadiène styrène. Partie 1/2.

Date de publication : 15/05/17


Un plastique, c’est quoi ? Rapide introduction

Une matière plastique est un ensemble de polymères. Les polymères sont de grosses molécules issues de l’assemblage de nombreuses petites molécules appelées monomères. Généralement, pour faire un polymère, il faut un ou deux types de monomères qui sont assemblés les uns aux autres.

Un polymère est donc comme une maison composée de centaines, voire de milliers, de briques. Ces briques élémentaires sont appelées monomères, d’où le terme de polymères quand on en assemble un grand nombre. 


Généralité sur la polymérisation : un polymère est un assemblage de monomères


Exemple de polymère : le polystyrène

Ce sont essentiellement les propriétés des monomères et la taille des polymères qui donneront les propriétés finales du plastique. Mou, dur, élastique etc.

Les polymères peuvent tout-aussi bien être d’origine synthétique (PVC, polystyrène etc.) que naturelle (amidon, cellulose, latex etc.). Si on appelle communément « plastique » les polymères d’origine synthétique, la frontière entre plastique purement synthétique et plastique « naturel » est mince.

Les premiers plastiques

Les premiers plastiques sont d’origine naturelle, au sens où ils sont issus de matières premières non fossiles (comme le pétrole) et subissent peu de transformation. Le premier plastique qui fut manipulé par l’Homme est le latex : il servait à faire des balles et des figurines 1600 ans avant notre ère en Amérique du sud1. La sève de l’arbre d’origine américaine Castilla elastica est encore utilisée de nos jours même si on lui préfère de loin l’Hévéa (hevea brasiliensis). D’après l’analyse d’objets amérindiens, les chercheurs ont trouvé que la civilisation méso amérindienne ne se contentait pas d’extraire la sève de l’arbre pour en faire des objets. En effet la sève, donc le latex, subissait deux transformations majeures : une purification du latex suivie d’une solidification de la phase plastifiante. La purification, première étape de la transformation, consiste à séparer le latex en deux phases. En effet, la sève est un mélange entre une phase aqueuse (essentiellement composée d’eau) et une phase de polymère qui est à proprement parlé le plastique naturel (cis-1,4-polyisoprene). Un peu comme une mayo composée d’oeufs et d’huile. Pour séparer les deux phases, les amérindiens mélangeaient le latex avec des extraits de la fleur d’ipomée blanche. L’extrait de cette plante contient des composés de la famille des acides sulfoniques chlorés qui vont en quelque sorte faire coaguler le latex. Après avoir permis de séparer les phases, les composés de la fleur modifient la structure de la phase polymère, ce qui la solidifie. Les amérindiens ont inventé la réticulation. 


De la sève de l’arbre à caoutchouc au latex

La réticulation

Mais comment ça marche et à quoi ça sert ? On peut imaginer n’importe quel plastique comme un plat de spaghettis où chaque spaghetti est un polymère. Dans une assiette, chaque spaghetti se colle à celui d’à côté. Pour qu’ils collent encore plus les uns aux autres, on peut ajouter de la colle : c’est la réticulation. Les spaghettis forment alors un réseau tridimensionnel, plus dur, plus élastique.

Concrètement la réticulation est l’établissement de ponts entre les chaines de polymère. Pour cela, il faut faire réagir le plastique avec d’autres composés chimiques.


La réticulation : des atomes ou des molécules (rouge) sont ajoutés aux polymères (bleu), ils permettent des liaisons entre les polymères, augmentant la tenue et l’élasticité du plastique

Le plus connu de ces procédés de réticulation est celui de la vulcanisation du caoutchouc qui consiste à ajouter du soufre au caoutchouc. Le soufre va permettre de faire des liaisons entre les polymères et d’obtenir un mélange qui a plus de tenue. Ce procédé fut mis au point par l’Américain Charles Goodyear en 1839. Oui Goodyear, comme la marque de pneus... Cette opération est indispensable pour faire des pneus car à l’état brut le caoutchouc n’a pas suffisamment de tenue pour garder une forme. C’est donc grâce ce procédé que les pneus existent et gardent leur forme.

Vers les premiers plastiques synthétiques

Le milieu du XIXème siècle voit s’accélérer les innovations en matière de plastique. Pour essayer de remplacer l’ivoire qui se fait cher, l’Anglais Alexander Parkes met au point en 1856 un plastique à base d’acide nitrique, d’éthanol et de cellulose. C’est la Parkésine2,3. En 1893, c’est le scientifique Français Auguste Trillat qui met au point une technique pour isoler les protéines du lait (la caséine) pour en faire une matière solide. Le formol qu’il utilise permet de séparer la caséine de l’eau et de la graisse qui composent le lait. Quatre ans plus tard, le procédé est amélioré et breveté par un allemand et un autrichien qui donnent au plastique le nom de Galalithe (littéralement, pierre de lait). Son procédé d’obtention a été affiné au début du XXème siècle4. Une expérience pour faire du plastique de lait avec du vinaigre est proposée dans la partie expériences ! Ces premiers plastiques ne pouvaient pas encore remplacer les matières premières d’origine naturelle car les coûts de production étaient trop élevés et les propriétés des matériaux encore insuffisantes (comme la résistance au temps).

C’est seulement au début du XXème siècle que le Belge Leo Baekland invente le premier plastique qu’on peut qualifier de 100% synthétique. A base de formaldéhyde et de phénol (composés issus du pétrole), il met au point la Bakélite. Avec 175 000 tonne produites par an en 1944, ce fut aussi le premier plastique produit à grande échelle3. La décennie 1930-1940 sera celle des plus importantes avancées avec l’invention du PVC (polychlorure vinyle) qui est le premier plastique dérivé de l’éthylène (brique élémentaire très répandue en chimie). La société allemande I.G. Farben sera le premier producteur de polystyrène et le nylon sera développé par l’équipe de recherche de Carothers travaillant pour l’entreprise américaine DuPont. Ce seront les deux décennies d’après-guerre qui seront celles du développement des plastiques. Dans les années 60, 10 millions de tonnes de plastique étaient produite, 100 millions en 1990, puis 300 millions en 2013 !5 Depuis, les industriels cherchent à créer de nouveau des plastiques d’origine végétales. A base de maïs par exemple polycaprolactone (PLA) ou encore l’acétate de cellulose dérivé du bois ou du coton. Leur intérêt écologique est encore en débat : s’ils peuvent se dégrader plus vite et être moins gourmand en ressources fossiles, ils présenteraient une toxicité spécifique6.

Quelques principes de fabrication des plastiques

Le principe du plastique est d’assembler un grand nombre de briques (monomères). Voilà pourquoi on parle de poly-styrène, poly-carbonates, poly-éthylène… On représente alors souvent les polymères avec une brique élémentaire en disant qu’elle est répétée.

Il existe deux principales manières de faire des polymères:

  • La polycondensation
  • La polymérisation en chaîne 


La polycondensation

Le principe de la polycondensation est basé sur des réactions en chaine de briques élémentaires (monomères). Grosso modo, il suffit de mettre ensemble les briques élémentaires pour qu’elles s’assemblent toutes seules comme des grandes. Le moyen le plus simple est d’utiliser deux sortes de molécules qui réagissent ensemble mais pas avec leurs congénères. Voici une image simple : un sac de filles, un sac de garçons. On mélange. Une fille donne sa main à un garçon, qui donnera son autre main à une autre fille, qui elle-même donnera sa main libre à un autre garçon et ainsi de suite. Les mains sont ce qu’on appelle en chimie des fonctions : alcool, acide, etc. Certaines mains se serrent (réaction), d’autre s’ignorent (pas de réaction). Il faut donc choisir les bonnes molécules, avec les bonnes fonctions, pour faire le polymère.

Par exemple : on mélange des di-alcools avec des di-acides et ça donne, non pas des Chocapic, mais du polyesther. Le même type de réaction existe avec les polyamides. Le truc le plus foufou, c’est quand on trouve une molécule avec une main fille et une main garçon, du coup elle réagit avec ses copin(e)s directement et on n’a donc besoin que d’un type de molécule. 


Les monomères du polyamide 6

La polymérisation en chaîne

Le principe de la polymérisation en chaîne est basé sur une activation. C’est le cas pour des  monomères qui, mélangés entre eux, ne réagissent pas tous seuls. Il leur faut un activateur. Sorte d’élément perturbateur qui va provoquer la bagarre générale. L’activateur va titiller un monomère et créer un monomère radical. Un radical est une forme que peut prendre toute molécule chimique et qui la rend extrêmement réactive. C’est donc seulement à ce moment-là, que le monomère pourra réagir avec un autre monomère. Se créé alors un dimère, qui réagira avec un autre monomère et ainsi de suite. On appelle donc aussi la polymérisation en chaîne, polymérisation radicalaire. Il existe ainsi trois étapes dans la réaction de polymérisation radicalaire :

1) l’amorçage qui active des monomères pour en faire des radicaux libres,

2) la propagation qui consiste à la réaction en chaine des monomères radicaux avec des monomères stables. Le produit de cette réaction, lui-même radicalaire, réagit alors par la suite avec un autre monomère stable etc.,

3) la terminaison qui consiste à arrêter la réaction.

Afin d’activer une réaction radicalaire, on peut utiliser des agents chimiques oxydants ou utiliser une action thermique. La réaction en chaîne s’arrête quand deux radicaux s’assemblent et annulent mutuellement leur réactivité en quelque sorte. C’est comme une fin de bagarre générale. A l’opérateur donc de bien choisir la quantité d’amorceurs et les conditions de réaction, afin de maitriser la synthèse de son plastique.


Codes des plastiques et leurs utilisations. Quelques références de plastiques, généralement présentes en bas des emballages.

Conclusion

  • Les plastiques peuvent être d’origine synthétique (pétrolière) ou naturelle (comme le latex ou le lait par exemple)
  • Les plastiques sont des agencements de polymères
  • Les polymères sont des agencements de monomères
  • Le choix des monomères confère grandement au plastique ses propriétés finales
  • La réticulation est une technique permettant de lier entre eux les polymères pour rendre le plastique plus élastique
  • La polymérisation peut soit être radicalaire soit par condensation


Phosphoré par : Gontier Adrien, Jaeger Catherine

Mots clefs : plastique, histoire

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Références ▼

[1] Hosler, D., Burkett, S. L. & Tarkanian, M. J. Prehistoric polymers: rubber processing in ancient Mesoamerica. Science 284, 1988-1991 (1999).

[2] Laszlo, P. Plastiques, sur Encyclopædia Universalis (2016) http://www.universalis.fr/encyclopedie/plastiques/

[3] Brydson, J. A. in Plastics Materials (Seventh Edition)     1-18 (Butterworth-Heinemann, 1999). http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/B9780750641326500425

[4] Belyamani, I. Développement d’un matériau thermoplastique biodégradable et hydrosoluble à base d’une protéine du lait, Université Jean Monnet-Saint-Etienne, (2011).

[5] Plasticseurope. Plastics – the Facts 2014/2015. An analysis of European plastics production, demand and waste data sur (2015) http://www.plasticseurope.org/documents/document/20150227150049-final_plastics_the_facts_2014_2015_260215.pdf

[6] Yates, M. R. & Barlow, C. Y. Life cycle assessments of biodegradable, commercial biopolymers—a critical review. Resources, conservation and recycling 78, 54-66 (2013).



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